Au XVIIIe siècle, et plus particulièrement à l’époque de Jean-Baptiste Greuze, le succès d’un artiste ne repose plus uniquement sur son talent ou la faveur d’un seul mécène. C’est le résultat d’une navigation habile au sein d’un « système » complexe et en pleine mutation, un écosystème où se croisent une institution monarchique, une opinion publique naissante et des logiques commerciales innovantes. Greuze, en particulier, a su maîtriser ces nouveaux rouages comme un véritable entrepreneur.
Pour un artiste, la route vers le succès se décomposait en trois étapes interdépendantes : la visibilité (diffusion), la validation (réception) et la rentabilité (commercialisation).
1. La Diffusion : L’Axe Académie-Salon
La diffusion de l’art, avant l’ère des musées et des galeries, était centralisée et contrôlée.
- L’Académie Royale : C’était le point de passage obligé. Elle détenait le monopole de la formation (le Prix de Rome) et, plus important encore, le monopole de l’exposition. Elle fixait la hiérarchie (la peinture d’histoire au sommet, la scène de genre en bas) et accordait le « label » de qualité.
- Le Salon (l’exposition) : C’était l’unique « scène » publique. Organisé par l’Académie au Louvre, cet événement (d’abord irrégulier, puis biennal) était le seul endroit où un artiste pouvait présenter son travail au roi, aux collectionneurs, aux critiques et, fait nouveau, au grand public parisien. Un triomphe au Salon, comme celui de L’Accordée de village de Greuze en 1761, était un événement qui faisait « le tout-Paris ».
