Pop Art, synthèse
L’hiver 1952-1953 marque un tournant silencieux dans l’histoire de l’art. Loin des grandes galeries parisiennes et new-yorkaises, un groupe d’intellectuels se réunit régulièrement à l’Institut d’Art Contemporain de Londres. Artistes, architectes, critiques et écrivains composent l’Independent Group, un collectif déterminé à dynamiter les conventions modernistes qui étouffent la création. Parmi eux : Eduardo Paolozzi, Richard Hamilton, Nigel Henderson, le critique Lawrence Alloway, l’architecte Rayner Banham, et le couple Alison et Peter Smithson. Personne ne se doute encore que ces rencontres vont accoucher d’une révolution esthétique majeure.
Les racines londoniennes d’une révolution visuelle
La première bombe explose lors d’une séance devenue légendaire. Paolozzi projette « BUNK! », une série de collages assemblés à partir de magazines américains qu’il a collectés durant son séjour parisien entre 1947 et 1949. Publicités criardes, bandes dessinées, pin-ups, appareils électroménagers rutilants – tout ce que la haute culture méprise s’étale sur les murs de l’ICA. Son collage « I was a Rich Man’s Plaything » de 1947 contient déjà le mot « pop », faisant de Paolozzi le prophète involontaire du mouvement à venir.

L’approche de l’Independent Group tranche radicalement avec l’attitude élitiste dominante. Lawrence Alloway le résume sans ambages : « Nous ne ressentions aucune aversion pour la culture commerciale, contrairement à la plupart des intellectuels, mais l’acceptions comme un fait, la discutions en détail et la consommions avec enthousiasme. » Cette acceptation sans complexe de la culture populaire constitue le socle philosophique du pop art britannique.
